jeudi 3 juillet 2008

Amori et Dolori Sacrum

Paris, Félix Juven, Editeur, 1910.

Auteur : Maurice Barrès

In-8 de VIII-313 pp.
La présence de cet ouvrage dans ce blog se justifie essentiellement par le fait qu'il présente une biographie très intéressante de Stanislas de Guaita.

Maurice Barrès (1862-1923) est un écrivain et homme politique français, figure de proue du nationalisme français.
Il étudia au collège de La Malgrange près de Nancy et, tout jeune interne, il ressentit cruellement ce premier "déracinement" et la promiscuité avec ses condisciples, peu respectueux de sa nature réservée. Après le "lycée de Nancy" (maintenant lycée Poincaré), il commença des études à la Faculté de Droit de Nancy. Son certificat d'inscription est d'ailleurs affiché dans la salle des professeurs de la Faculté, et une plaque commémorative a été aposée 38 rue de la Ravinelle, où il louait une chambre.
Poussé par sa vocation littéraire, Barrès partit pour Paris, et fit accepter ses textes dans diverses revues. C'est le début de sa carrière littéraire.
Barrès multiplia les collaborations aux revues littéraires, et fonda la sienne propre, Les Taches d'Encre, très éphémère.
C'est Paul Bourget qui, le premier, en 1888, dans un article au journal Les Débats, attira l'attention sur l'auteur, encore inconnu, de Sous l'œil des Barbares. Cette année-là, il fut élu député de Nancy, dans la mouvance boulangiste.
Sacré «Prince de la Jeunesse», exaltant, dans les trois volumes du Culte du Moi (1888-1891), l'individualisme, la recherche des expériences et la satisfaction des sens, il fut à l'origine surtout apprécié à gauche, et plus particulièrement par Léon Blum. Son œuvre d'alors se rattache au "roman d'analyse", nourrie par les travaux d'Hippolyte Taine, d'Ernest Renan, mais aussi par les écrivains mystiques. Pourtant, Maurice Barrès finit par percevoir cette recherche uniquement personnelle comme une impasse.
La publication des Déracinés (1897), puis de L'Appel au Soldat, montre l'évolution de sa pensée vers le nationalisme républicain et le traditionalisme, avec l'attachement aux racines, à la famille, à l'armée et à la terre natale. Maurice Barrès est aussi le grand écrivain de la Revanche contre l'Allemagne victorieuse en 1871, avec Colette Baudoche.
Maurice Barrès retrace son évolution personnelle dans le texte Le 2 Novembre en Lorraine. Il y évoque «la terre et les morts», «les grands cimetières où souffle l'esprit», en finit avec l'individualisme forcené de sa jeunesse, développe l'idée que notre «Moi» n'est que «l'éphémère produit de la société», et en vient à la conclusion que «notre raison nous oblige à placer nos pas sur les pas de nos prédécesseurs». L'évolution de sa pensée n'est pas sans rapport avec la mort de son père et surtout de sa mère.
Il fut élu en 1906 à l'Académie Française, et entra de nouveau à l'Assemblée Nationale, cette fois en tant que député du quartier des Halles à Paris. En 1907, il racheta le château de Mirabeau à l'écrivaine Gyp.
On sait qu'il aima, de façon semble-t-il platonique, la poétesse Anna de Noailles, et que cet amour lui inspira Un Jardin sur l'Oronte.
Barrès voyagea beaucoup, notamment en Grèce d'avril à mai 1900, un périple qu'il retrace dans son récit Voyage à Sparte (paru en 1906). Il remonta le Nil en décembre 1907-janvier 1908. De ce voyage, on ne connaît que quelques notes dans ses Cahiers. Barrès retourne en Orient en mai-juin 1914 : Alexandrie, Beyrouth, Damas, Alep, Antioche, etc. Son récit de voyage Une Enquête aux pays du Levant n'a paru qu'en novembre 1923.
Parallèlement à sa carrière d'écrivain, Barrès eut une activité politique importante. Élu député boulangiste de Nancy à 27 ans, il se voulait aussi socialiste et siégea à l'extrême-gauche. Il fonda l'éphémère revue nationaliste La Cocarde. Il adhéra ensuite à la Ligue des Patriotes de Paul Déroulède, et fut antidreyfusard. Alors que le jeune Léon Blum était venu lui rendre visite en espérant le rallier au combat pour la réhabilitation de Dreyfus, il refusa et écrivit un certain nombre d'articles antisémites, affirmant notamment : «Que Dreyfus ait trahi, je le conclus de sa race.»
Proche de Charles Maurras, son cadet, mais qui exerça sur lui une réelle fascination, Barrès refusa pourtant d'adhérer aux idées monarchistes tout en marquant, jusqu'à sa mort, sa sympathie pour l'aventure intellectuelle de l'Action Française. La plupart des penseurs de la nouvelle école royaliste (Jacques Bainville, Henri Vaugeois, Léon Daudet, Henri Massis, Jacques Maritain, Georges Bernanos, Thierry Maulnier, …) reconnurent d'ailleurs leur dette vis-à-vis de Barrès, qui fut l'inspirateur de plusieurs générations d'écrivains (parmi lesquels Henry de Montherlant, André Malraux, François Mauriac, Louis Aragon).
Il est élu député de la Seine en 1906 et le reste jusqu'à son décès (il siège alors au sein de l'Entente Républicaine Démocratique).
En 1908, un vif duel oratoire l'opposa encore à Jean Jaurès au Parlement, Barrès refusant la panthéonisation d'Émile Zola défendue par Jaurès.
Adversaire politique, mais ami de Jaurès et des pacifistes à la veille de la Grande Guerre, Barrès vint un des premiers s'incliner, le 1er août 1914, devant le corps de Jaurès, assassiné la veille par le nationaliste Raoul Villain.
Pendant la Grande Guerre, Barrès fut un acteur important de la propagande de guerre et du «bourrage de crâne». Il exalta les combats en cours et gagna auprès des pacifistes le surnom de «rossignol des carnages». Le pacifisme était certes devenu une opinion très minoritaire, et la lutte contre l'Allemagne impériale pangermaniste, «la guerre du droit», avait emporté l'adhésion même d'une majorité des socialistes et des anarchistes. Ses Carnets montrent cependant qu'il n'était pas dupe de l'optimisme de commande qu'il affichait dans ses propres articles : ils révèlent des poussées de pessimisme et un fréquent désabusement, parfois à la limite du défaitisme.
Revenant en partie sur ses erreurs, Maurice Barrès rendit aussi, pendant la Grande Guerre, un vibrant hommage aux juifs français dans Les familles spirituelles de la France, où il les place au côté des traditionalistes, des protestants et des socialistes comme un des quatre éléments du génie national (s'opposant ainsi à Maurras, qui en fait les «quatre États confédérés» de l'Anti-France). Il immortalisa la figure du rabbin Bloch, frappé à mort au moment où il tendait un crucifix à un soldat mourant.
Avec un certain nombre de chefs nationalistes et militaires, tel Ferdinand Foch, il plaida pour une nouvelle frontière, plus sûre, sur la rive gauche du Rhin. Le 24 juin 1920, la Chambre des Députés adopta son projet visant à instituer une fête nationale de Jeanne d'Arc.
Maurice Barrès encouragea les débuts littéraires de François Mauriac et de Louis Aragon, et eut de bonnes relations avec le jeune Léon Blum. Pendant la Seconde Guerre mondiale, son fils, l'écrivain Philippe Barrès, mit sa plume au service de Charles de Gaulle et de la France Libre.
L'importance de Maurice Barrès, pour toute une génération, a été rappelée par l'historien Michel Winock dans son livre Le Siècle des Intellectuels (Seuil, 1995) : la première partie de l'ouvrage a pour titre «Les années Barrès», que suivent «Les années Gide» et «Les années Sartre».
L'hommage que lui rendit le jeune Léon Blum, dans La revue blanche est resté célébre :
Je sais bien que Monsieur Zola est un grand écrivain; j'aime son œuvre qui est puissante et belle. Mais on peut le supprimer de son temps par un effort de pensée; et son temps sera le même. Si Monsieur Barrès n'eût pas vécu, s'il n'eût pas écrit, son temps serait autre et nous serions autres. Je ne vois pas en France d'homme vivant qui ait exercé, par la littérature, une action égale ou comparable.
Maurice Barrès et l'occultiste Stanislas de Guaita furent amis dès l'année 1878, au Lycée de Nancy. Leurs chemins se différencieront en 1882, lors de leur arrivée à Paris.
Non croyant, Maurice Barrès était attiré par l'Asie, le soufisme et le chiisme. Il revint toutefois, dans ses dernières années, à la foi catholique et engagea dans L'Écho de Paris une campagne pour la restauration des églises de France, fortement dégradées depuis les lois de séparation de 1905.
Au printemps 1921, les dadaïstes organisent le procès, présidé par André Breton, de Maurice Barrès, accusé de «crime contre la sûreté de l'esprit». Georges Ribemont-Dessaignes est l'accusateur public, la défense est assurée par Aragon et Soupault, et, parmi les témoins se trouvent Tzara, Péret, Drieu La Rochelle, Jacques Rigaut… Cette manifestation, à l'issue de laquelle Barrès est condamné à vingt ans de travaux forcés, est à l'origine de la dislocation du mouvement dadaïste (1922), les fondateurs du mouvement (Tristan Tzara en tête) refusant toute forme de justice, même organisée par Dada.
(d’après Wikipedia)